Environ 200 personnes ont fustigé les méthodes autoritaires du président Erdogan.
Manifestation à Nantes ce 23 mars 2025

Atilgan, 32 ans, franco-turc : “Erdogan triche, les élections sont truquées, les gens en ont marre”

Alors que la Turquie connaît un mouvement de contestation populaire majeur depuis l’arrestation du maire d’Istanbul le 23 mars 2025, Atilgan Ozer, un franco-turc vivant à Nantes, témoigne de son inquiétude pour ses proches et partage sa vision de la crise qui secoue son pays d’origine.

La Turquie est traversée depuis le 19 mars 2025 par une vague de manifestations sans précédent. L’élément déclencheur : l’arrestation d’Ekrem İmamoğlu, le populaire maire d’Istanbul, perçue comme une manœuvre du président Erdoğan pour écarter un rival. 

Ces événements ont provoqué l’indignation de centaines de milliers de Turcs qui manifestent quotidiennement dans les grandes villes du pays. La répression est sévère : plus de 2000 arrestations, censure des médias et répression violente des rassemblements.

Atilgan Ozer, 32 ans, franco-turc né à Nantes, suit avec anxiété l’évolution de la situation. “Je m’informe via un mélange de sources : médias français, turcs et réseaux sociaux, pour me forger une opinion objective,” explique-t-il. Pour lui, la principale revendication des manifestants est claire : “La justice. Le président triche, les élections sont truquées, les gens en ont marre. L’arrestation d’İmamoğlu a été la goutte d’eau qui fait déborder le vase.”

Une économie à la déroute

La situation touche directement ses proches. “Mes oncles, mes cousins et cousines qui vivent à Istanbul le vivent tous les jours. Ils vont manifester en famille parce qu’ils veulent du changement.” Son inquiétude est palpable quand il évoque l’avenir de ses jeunes cousins étudiants et la situation économique catastrophique (44% d’inflation en 2024). “Actuellement, 1 euro équivaut à 42 liras. Le plus gros billet turc représente 5 euros ! Tu imagines, c’est comme si avec 200 euros, tu achetais un coca !”

Ce père de trois enfants installé à Orvault n’hésite pas à aider financièrement sa famille en Turquie. Surtout pour défendre un cousin, jeune militant du CHP (Le Parti républicain du peuple), opposant à Erdogan, condamné à 20 ans de prison ferme il y a huit ans lors d’une arrestation pendant une manifestation. “On a envoyé 10 000 euros pour payer un avocat, en vain. C’est simple là-bas : si t’es contre le gouvernement, t’es fini.”

Une diaspora divisée et des projets incertains

Quant à l’impact de la diaspora turque en France, Atilgan se montre pessimiste. “Ça n’aura aucun impact, parce qu’une majeure partie de la communauté turque ici soutient Erdogan. Ils ne vivent pas là-bas et ne sont pas concernés. Pour eux, l’euro à 42 liras fait leur bonheur pendant les vacances.”

Malgré la situation, Atilgan espère se rendre en Turquie cet été, avec sa famille. “On hésite. Le peuple va être sur les nerfs et les policiers aussi, donc il y a des risques.” Il reste cependant optimiste : “D’après mon oncle, dans 2-3 mois, ça devrait s’apaiser si les manifestants obtiennent gain de cause.” En attendant, il observe avec amertume l’indifférence internationale  : “Les grands dirigeants s’en foutent de la Turquie parce que c’est loin. Tant que ça reste interne, tout le monde se fout des régimes autoritaires.”

Le Fil Info

Autres articles