Engagé pour la troisième fois dans le Vendée Globe, le skippeur Japonais Kojiro Shiraishi, 57 ans, devrait arriver ce week-end. Avant sa première participation en 2016, les Japonais n’avaient aucune idée de ce que représentait la discipline. Suivie aujourd’hui par des millions de téléspectateurs au Japon, la voile est en plein développement. Comment le Vendée Globe est-il arrivé à l’autre bout de la planète ? Pour ADN, nous avons obtenu un entretien avec le skippeur encore en mer.

“Cela m’a pris 30 ans pour participer à cette course.” Kojiro Shiraishi a découvert le Vendée Globe alors qu’il n’avait que 21 ans. En 1989, son mentor Yukoh Tada est invité à participer à la première édition du Vendée Globe par Philippe Jeantot, le fondateur de la célèbre course de voile. Faute de sponsors, Yukoh Tada ne peut pas participer à la course. 2 ans plus tard, il manque le départ d’une autre course et culpabilise. En rentrant chez lui à Sydney, il est retrouvé mort pendu dans son appartement, n’ayant pas supporté ses échecs.
A ce moment-là, Kojiro Shiraishi se met en quête d’accomplir les rêves de son mentor. En hommage à son maître, tous ses bateaux se nomment Spirit of Yukoh (l’esprit de Yukoh). Il garde toujours en tête le Vendée Globe, auquel il se promet de participer un jour. En 2016, il prend le départ de la course et devient le premier skippeur asiatique à s’élancer sur l’Everest des mers, course inconnue du grand public au Japon et “qui ne connait même pas le concept de course aux larges à la voile” explique Kojiro.
Quand le Japon découvre la Vendée
“J’ai profité d’une bonne couverture médiatique pour faire découvrir cette discipline au Japon. Le département de la Vendée est maintenant un peu connu grâce à la course mais j’espère le démocratiser davantage.” détaille le skippeur. Amateur d’huitres et de sardines vendéennes, Kojiro Shiraishi participe, à lui seul, au rayonnement du département et des Pays de la Loire au Japon. Au départ de la course, c’est une centaine de supporters japonais qui ont fait le déplacement pour de le soutenir. C’est dire à quel point la course est devenue populaire là-bas. Soutenu dans son projet en Vendée, il est aussi très suivi chez lui : “La télévision nationale, TV Asahi, me suit beaucoup. Nous faisons des lives avec eux tous les vendredis à l’heure de pointe japonaise. Cette émission est visionnée par des millions de téléspectateurs.”
Le développement de la voile
Ambitieux de faire découvrir sa discipline aux jeunes japonais et de continuer sur sa lancée, Kojiro Shiraishi explique “qu’après le Vendée Globe 2020, nous avons créé avec DMG MORI une académie de voile, où nous avons de jeunes skippers japonais ambitieux de faire des courses, avec par exemple la Mini Transat.” Malgré toutes ces opérations, l’État n’accorde pas plus de budgets aux structures qu’il souhaite mettre en place afin de “créer des opportunités que je n’ai pas eu dans le passé pour des jeunes japonais.”
L’argent, nerf de la guerre
Autre difficulté pour le skipper, trouver des financements : “En 2016 c’était compliqué de trouver des sponsors. Mais j’ai eu la chance de rassembler rapidement des partenaires et j’ai pu prendre le départ. Cela m’a permis de trouver des sponsors supplémentaires et notamment DMG MORI, qui veut démocratiser la course nautique au Japon. C’est aujourd’hui leur première source de motivation.” explique Kojiro.
Quelle suite ?
Alors qu’il devrait arriver ce week-end, il bouclera son deuxième Vendée Globe sous la barre symbolique des 90 jours, lui qui l’avait achevé en 94 jours en 2020. L’avenir de la voile s’annonce radieux au Japon, tout comme en Asie. Comme lui, un autre skipper asiatique, le Chinois Jingkun Xu, était au départ de la course cette année. D’ici quelques années, certains de ses élèves pourraient bien, eux aussi, prendre le départ du Vendée Globe.