Un atelier pour apprendre à forger à l’ancienne, au cœur de Rezé

Une forge associative au coeur de Rezé, l’idée paraît farfelue, et pourtant. À 60 ans, Gil Chef transmet sa passion et sa connaissance de la forge artisanale à des novices, les mercredis après-midi et les samedis matin.

Dans la grande rue Jean-Jaurès, il n’y a que le bruit des voitures, des passants et des commerces. Mais si l’on prête l’oreille, derrière un grand portail en fer, on peut entendre résonner des coups de marteau. Aussi étrange que cela puisse paraître, s’est installée en plein coeur de Rezé, une forge artisanale et traditionnelle, avec à la baguette, Gil Chef, artiste métallier.

Gil (en veste brune) n’hésite pas à donner des conseils ou à répondre aux questions. Crédit : Antonin Patarin

“Moi j’enseigne la forge, mais nous sommes dans un lieu collectif d’artistes”

Même si l’on vient ici pour le loisir, au sein de la modeste forge, le travail s’apprend avec rigueur. Les six membres de l’atelier travaillent individuellement leurs projets, sous les conseils avisés de Gil. “Les gens viennent créer et sculpter leur propres pièces ici. Certains font des sculptures à offrir, des petits dragons… Mais il y aussi des gens qui sont là pour faire de la coutellerie, comme on peut voir sur les réseaux ou à la télé”, explique le sexagénaire. “Moi je suis là pour leur enseigner la forge traditionnelle. Travailler avec une enclume, un point de chauffe, et pour les plus ambitieux, travailler le Damas (ndlr : mélange de deux métaux)”.
Ces cours, ils entrent dans le cadre de l’association Être artisan de sa vie, une association aux multiples facettes. “Moi, j’enseigne la forge, mais nous sommes dans un lieu collectif d’artistes avec certains qui font de la poterie, de la gravure, de la reliure, etc…”, liste Gil. “Au total, nous sommes 15 artistes qui tournons ici et qui faisons des ateliers partagés.”

L’établi ne manque pas de croquis. Être forgeron ne signifie pas simplement prendre un marteau.

Des outils modernes comme très anciens

A l’intérieur, on peut distinguer deux clans. Non pas deux groupes de travailleurs, mais deux groupes d’outils. L’un est plus ancien avec pour représentant de nombreuses enclumes, des marteaux, d’autres outils en fer permettant le déplacement et le travail des objets chauds. En face d’eux, les machines modernes avec les fours à gaz, les ponceuses et tout le matériel de soudure. Deux groupes d’outils, dont Gil ne fait pas du tout la même utilisation, ni le même enseignement. “Comme je l’ai dit, moi j’enseigne le marteau, l’enclume et le point de chauffe, mais parce que c’est la base du forgeron. C’est la forge traditionnelle et c’est ce pourquoi les gens viennent”, analyse le professeur. “Les autres outils sont beaucoup plus techniques, nécessitent de la maîtrise, mais permettent également plus de précision… Comme pour travailler le Damas.”

Un atelier pour tous les niveaux

Si la majorité des membres présents sont novices, certains pratiquent depuis le début de l’association et s’exercent maintenant à des techniques plus avancées. C’est le cas de Thomas, 47 ans, menuisier de formation, présent dans la forge depuis trois ans et demi. “Là, j’essaye de faire une hache, ce qui est assez technique. J’avance pas à pas et ça commence à prendre forme”, explique-t-il. “La forge c’est quelque chose qui m’a beaucoup plu car on travaille un matériaux brut. On ne vient pas avec des pièces déjà faites qu’on doit assembler, on les crée nous-même. Puis c’est un métier manuel, donc j’étais pas perdu en arrivant ici (rire).”

Pour réaliser sa hache, Thomas n’hésite pas à se mettre à la soudure.

Mais le but de cette forge, c’est aussi l’occasion de faire découvrir un métier archaïque aux nouvelles générations. À 14 ans, Ernest est le plus jeune du groupe, mais Gil le montre en exemple : “Ernest il est là à l’année, et il fabrique des petits objets, des porte-clés, des pièces ludiques, mais il travaille avec les mêmes outils que nous, qui sont anciens et un peu dangereux. C’est bien car on voit qu’il maîtrise son savoir-faire.”

A seulement 14 ans, Ernest manie déjà très bien le marteau et les techniques de forge.

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