Jo Héré ACBN
Jo Héré, président de l'Association conservatoire pour l'abeille noire bretonne (ACANB). © Léo Cognée

« Préserver l’abeille noire bretonne, c’est un combat de tous les jours »

Au pied du phare du Stiff, à Ouessant, nous avons rencontré Jo Héré. Il est le président de l’ACANB (Association Conservatoire de l’abeille noire bretonne). Avec les autres membres, il préserve activement cet insecte, une espèce rare et menacée. 

Comment êtes-vous devenu apiculteur à Ouessant ? 

Je suis né sur l’île, mais j’ai vécu ailleurs, sur le continent. Je suis revenu vivre ici à ma retraite et je suis devenu apiculteur amateur à ce moment-là. Mon cadeau de départ à la retraite, c’était d’ailleurs une ruche ! L’abeille est donc venue avec moi à Ouessant.

Vous préservez une espèce devenue rare.

Absolument. C’est l’abeille noire de Bretagne. En 2010, je voulais moi-même importer des abeilles. Mais j’ai appris que c’était impossible car Ouessant préserve une espèce devenue unique, l’abeille noire, qui est endémique de l’Europe de l’Ouest depuis 2 millions d’années.

Malheureusement, dans les années 1980, le varroa, un parasite venu d’Asie, l’a décimée. Les apiculteurs, pour continuer leur production, ont donc importé de nouvelles espèces. L’abeille noire a été complètement hybridée en Europe. 

Pourquoi Ouessant fait figure d’exception ?

Un ancien de la Marine Nationale avait envoyé des essaims sur l’île, dans les années 1980, avant l’arrivée du varroa. L’île étant éloignée du continent, elle a été épargnée. L’abeille noire est donc pure à presque à 100% ici !

En quoi consiste le travail de votre association ?

Le but de mon association n’est pas de faire du miel mais de préserver cette espèce et sa génétique, pour l’avenir. Surtout pour les scientifiques, afin qu’ils puissent l’utiliser dans le cadre de leurs travaux. On travaille beaucoup avec le CNRS.

On agit comme un conservatoire au niveau mondial. Mais préserver l’abeille noire bretonne, c’est un combat de tous les jours !

Abeilles Ouessant
Un des cinq ruchers de l’île. Les abeilles évoluent dans un cadre naturel exceptionnel. Le miel d’Ouessant est très prisé. © Léo Cognée

À quels dangers doit justement faire face l’abeille noire ? 

Elle est très sensible. Le varroa a malheureusement fini par débarquer il y a quatre ou cinq ans. On a perdu 70% des colonies. Ça remonte très doucement. 

Il faut aussi faire face aux pesticides et au frelon asiatique. On doit également veiller à ce que des gens n’importent pas d’autres abeilles du continent ! C’est arrivé une fois, et on a réussi à faire repartir la ruche. C’est très difficile d’être apiculteur aujourd’hui.

Le travail de sensibilisation est donc essentiel ? 

Absolument. On travaille beaucoup avec les écoles, avec qui on a plein de projets. Nous organisons aussi une fête de l’abeille chaque année, en septembre, durant laquelle nous faisons intervenir des spécialistes. On essaie de communiquer au maximum pour faire passer notre message. Nous avons également créé une exposition permanente, au pied du phare du Stiff, avec des panneaux explicatifs. On a environ 40 000 visiteurs par an. 

Et où peut-on voir les abeilles sur l’île ?

Les 90 ruches sont réparties en cinq ruchers, partout sur l’île. Des locaux sont mis à notre disposition par le Conservatoire du Littoral au pied du phare du Stiff, pour accueillir les bénévoles. Le phare est un peu devenu la maison des abeilles, ou des apiculteurs, en tout cas ! 

Léo Cognée

Jo Héré phare du Stiff
Jo Héré au pied du phare du Stiff. Les anciens logements des gardiens servent aujourd’hui aux membres de l’ACANB. © Léo Cognée

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