Ce mercredi 8 octobre, au tribunal d’Albi, la mère de Cédric Jubillar, Nadine F., a craqué à plusieurs reprises à la barre, submergée par l’émotion en évoquant les paroles troublantes de son fils avant la disparition de Delphine.
Très tôt ce matin, dans le centre-ville d’Albi, la plupart des volets sont encore fermés. Les rues sont désertes, mais du côté du tribunal, une certaine agitation se fait sentir. Une cinquantaine de personnes sont déjà sur place, rafraîchies par la rosée matinale. La première de la file, c’est Marie-Laure, habitante d’Albi, arrivée vers quatre heures du matin. Peu bavarde, méfiante envers les journalistes, elle glisse simplement : « C’est très important d’être là, l’ambiance est très particulière. »
Derrière elle, d’autres attendent patiemment, cigarette ou téléphone à la main, chacun trouvant de quoi s’occuper. Vers 7 h 45, une lumière bleue vient soudain se refléter sur les visages de la file d’attente. Une sirène retentit : Cédric Jubillar arrive au tribunal dans une voiture des forces de l’ordre, escortée par des motards. Il ne reste plus qu’une heure et demie à patienter avant de pouvoir pénétrer dans les couloirs de la cour.

« Plus de six heures à attendre »
Mais pour Gabin, 24 ans, venu d’un petit village près d’Albi, inutile de se faire d’illusions :
« Je suis arrivé vers 6 h 30, mais je sais qu’on ne rentrera pas pour l’audience de ce matin », affirme-t-il calmement. « J’attends celle de cet après-midi (N.D.L.R. : audition des co-détenus de Cédric Jubillar). Elle m’intéresse. Certes, ça fait plus de six heures à attendre, mais avec des chocolatines, le temps va vite passer », rit-il avec un bel accent du sud.
Deux salles ont été aménagées pour ce procès. D’abord, la salle d’audience où siègent les magistrats, la cour et les nombreuses parties civiles. Mais elle ne laisse que très peu de places au public (une quinzaine environ). Pour y remédier, une seconde salle de 90 places a été ouverte, avec une retransmission vidéo en direct pour les journalistes et quelques spectateurs.
Nadine F, sa mère, principale témoin de l’enfance de Cédric Jubillar
Il est neuf heures. Le procès commence. Nadine F. est appelée à la barre. Vêtue d’un haut blanc et d’un tailleur bleu ciel, elle s’avance d’un pas hésitant devant les magistrats, prête à prêter. Pendant près d’une heure, elle revient sur sa vie, ses difficultés, mais aussi sur l’enfance de son fils, Cédric Jubillar. De sa naissance, alors que Nadine F. n’avait que 16 ans et demi, jusqu’à leur relation durant son adolescence, en passant par placement de son fils en famille d’accueil : tout est passé au peigne fin pour mieux comprendre le passé de l’accusé.
Nadine F. évoque également sa relation avec sa belle-fille, Delphine Jubillar, qu’elle considérait « comme sa fille » et qualifiait de « douce et timide ». Sa voix est tremblante, souvent brisée par l’émotion.
« Aujourd’hui, je regrette de ne pas avoir donné plus de sens à cette phrase. »
Lorsqu’elle aborde les dernières conversations avec son fils, juste avant la disparition de Delphine, les mots deviennent insoutenables. « “Je vais la tuer, je vais l’enterrer, personne ne va la retrouver”, m’avait-il dit un soir, dans la voiture, alors que Delphine voulait divorcer », confie-t-elle en larmes. « Aujourd’hui, je regrette de ne pas avoir donné plus de sens à cette phrase. »
Une relation mère-fils avortée
La cour semble frappée par le choc de ces révélations. Dans le box des accusés, Cédric Jubillar reste impassible, les jambes écartées, sans la moindre réaction. Nadine F. apporte ensuite de nombreuses précisions sur la journée du 16 décembre (N.D.L.R. : jour de la disparition de Delphine Jubillar) : « Mon fils m’a appelée et m’a donné l’ordre de venir chez lui. Dans ces cas-là, on ne réfléchit pas, on y va. En arrivant, il m’a signalé la disparition de Delphine et m’a demandé de m’occuper des enfants pendant qu’il partait à la gendarmerie. »
À ce jour, Nadine F. refuse d’écrire à son fils : « Au début, je lui envoyais des lettres pour parler de ses enfants, mais il ne rebondissait pas. J’ai fini par avoir un blocage. Aujourd’hui encore, je ne peux pas. » Constituée partie civile, Nadine F. affirme être là avant tout « en tant que mamie », pour le bien de ses petits-enfants et pour connaître la vérité. À l’issue de ses déclarations, la séance est suspendue. Devant le tribunal d’Albi, cigarette à la main, Nadine F. reprend ses émotions un instant avant de reprendre et répondre, quelques dizaines de minutes plus tard, aux questions des avocats.