Edmond Berteux (1911 – 1991) a peint la région de Nantes durant des décennies, témoignant de l’évolution urbaine et industrielle du XXe siècle. Son fils, Edmond Guibert-Bertreux, nous confie quelques souvenirs.
Nombreux sont les peintres ayant immortalisé la Cité des Ducs et sa région. Mais rares sont ceux qui ont réussi à entrer dans le cœur des Nantais. Edmond Bertreux est de ceux-là.
Edmond Bertreux nait à Rezé, près de Trentemoult. Son œuvre néo-impressionniste est essentiellement paysagiste. Il immortalise, au cours des décennies, Nantes et sa région, la Vendée et le Pays de Retz.

Un artiste prolifique
Le jeune Edmond Bertreux entre aux Beaux-Arts de Nantes en 1927, et réalise sa première exposition en 1930. Il marche dans les pas du peintre vendéen Charles Milcendeau. Certains disent ainsi d’Edmond Bertreux qu’il est le dernier peintre du XIXe siècle à vivre au XXe siècle. Au cours de sa longue carrière, qui s’étend des années 1930 à la fin des années 1980, il immortalise, dans des centaines de toiles, une région qui subit de plein fouet les bouleversements du XXe siècle. De la fête des moissons dans les petits hameaux vendéens aux cargos modernes dans le port de Nantes, l’œuvre de Bertreux traverse les époques.


« Il a très vite volé de ses propres ailes » nous confie son fils Edmond Guibert, auteur et poète spécialiste de l’histoire maritime nantaise. « Il était plus qu’un peintre. C’était un observateur et un chroniqueur de son époque. Il a écrit des centaines et des centaines d’articles, il aimait beaucoup la presse, on le voyait toujours dans les salles de rédaction. Il y a une valeur de témoignage tant dans ses tableaux que dans ses écrits. »
La toile la plus célèbre d’Edmond Bertreux est certainement l’incendie de la cathédrale de Nantes, le 28 janvier 1972, dont il est un témoin direct. « Depuis son atelier, rue Henri IV, il a vu des lueurs orange et rouge sur les murs. En regardant pas la fenêtre, il a vu la toiture embrasée. Il a alors peint son œuvre la plus célèbre ». Cette toile est exposée depuis 1988 dans la cathédrale de Nantes, actuellement en restauration suite à l’incendie de 2020.


Un artiste engagé très présent dans l’imaginaire Nantais
Edmond Bertreux, comme beaucoup d’artistes de sa génération, s’engage. Il manifeste ardemment contre la construction d’une centrale nucléaire au Pellerin dans les années 70. Il se place aussi comme défenseur du patrimoine historique et industriel Nantais. « Il avait une grande sensibilité pour le patrimoine, à une époque où on s’y intéressait très peu. Il a, par exemple, réussi à sauver la Gare de l’Etat (ndlr : devenue maison des syndicats). » Cet engagement lui vaut parfois des accrochages avec les hommes politiques nantais, qui font souvent les titres de la presse locale de l’époque.
Edmond Bertreux est aussi un véritable personnage de Nantes. « Il fait partie de l’imaginaire de la ville » poursuit Edmond Guibert. « Dans les rues, tout le monde le connaissait. Dans chaque bistrot où nous passions, les gens venaient le voir et demandaient des autographes ».

Un musée Edmond-Bertreux ?
L’œuvre d’Edmond Bertreux a été très fréquemment exposée, et a fait l’objet de nombreux ouvrages. « C’est une production qui plait beaucoup. Le public est toujours au rendez-vous, c’est très intergénérationnel » explique Edmond Guibert.
Les descendants d’Edmond Bertreux veulent désormais voir plus loin. « Aujourd’hui, se pose la question de la postérité. Nous voulons engager, avec des responsables politiques, mais pas que, une réflexion autour de la conservation de cette œuvre. » Avec, à la clé, la création d’un éventuel musée. « Cette collection doit devenir une affaire institutionnelle, à la portée de tous. Nous sommes aujourd’hui à la recherche de partenaires pour mener ce projet », conclut Edmond Guibert. « C’est toute une vie de sensibilité artistique au service d’une région qu’il faut valoriser. »


Léo Cognée