Éducatrice spécialisée à Nantes, mère de deux enfants, Anne-Claire Pun mène aussi une vie tournée vers l’Himalaya. Entre son métier, son engagement associatif et son histoire personnelle, elle dédit sa vie à un pays pour lequel elle n’a aucune attache familiale.
De Campbon en Loire-Atlantique, peu de choses destinait Anne-Claire Pun à regarder vers l’Himalaya. Malvoyante, elle a grandi avec le goût du défi. « Même si on me disait tu ne pourras pas faire ça, je me disais : si, je vais le faire quand même. » L’escalade et la montagne deviennent ses refuges.
C’est en fréquentant des amis népalais, rencontrés lors de ses années parisiennes, qu’elle se rapproche d’un pays qui la fascine déjà par ses sommets. « Grâce à eux, j’ai découvert une culture, une façon de vivre différente, et ça m’a parlé. » Le Népal s’impose peu à peu comme une évidence, à la fois par passion de la montagne et par désir de solidarité.
En parallèle, elle suit la voie de l’éducation spécialisée. Vingt ans auprès d’enfants autistes en institution forgent sa conviction : « Avoir un handicap n’empêche pas de faire plein de choses. »
Aujourd’hui installée en libéral, elle jongle entre ses consultations, un emploi salarié dans une association médico-sociale et sa vie de famille. Deux petites filles, une maison à Nantes, et un emploi du temps « bien rythmé », dit-elle en riant.

Une rencontre qui change tout
En 2006, elle cofonde l’association Namaste enfants d’Himalaya, née d’un simple repas népalais organisé pour récolter des fonds en faveur d’un orphelinat. Dix-huit adhérents au départ, une centaine dès 2010, et depuis une dizaine de projets soutenus : salaires de professeurs en montagne, équipements spécialisés, reconstruction de sanitaires après le séisme de 2015.
Mais derrière l’association, il y a surtout une rencontre. En 2008, lors d’une mission à Katmandou, elle croise celui qui deviendra son mari. Lui est assistant en ophtalmologie, engagé dans des camps médicaux itinérants. Ensemble, ils développent des projets dans son village natal, comme la construction d’un centre éducatif. En 2009, ils se marient en France, puis célèbrent aussi leur union selon la tradition népalaise.
Installés à Nantes, ils élèvent aujourd’hui leurs enfants tout en gardant un lien fort avec le pays. « Quand je l’ai rencontré, il ne parlait pas un mot de français. Aujourd’hui, il est bilingue », raconte Anne-Claire.
Suivre la crise népalaise depuis Nantes
Depuis la Loire-Atlantique, Anne-Claire reste connectée quotidiennement au pays de son mari. Les projets de l’association passent par des relais locaux et les réseaux sociaux, mais les crises politiques compliquent parfois tout. Ces derniers mois, le Népal a été secoué par des manifestations contre la corruption, la répression policière et la chute du gouvernement. « On se sent impuissants. Même nos transferts d’argent pour un orphelinat ont été bloqués », confie-t-elle.
Pourtant, l’histoire récente suscite aussi une forme d’optimisme. Une Première ministre a été nommée, la première de l’histoire du pays, et elle s’est entourée de personnalités reconnues pour leur intégrité. « C’est une révolution. Le peuple reprend la parole », dit Anne-Claire, qui observe tout cela depuis Nantes, entre inquiétude et espoir. D’autant que son mari est reparti en urgence au Népal pour accompagner sa sœur malade. « Là-bas, rien n’est pris en charge, c’est très difficile », souffle-t-elle.
Entre son métier d’éducatrice, ses deux filles et ses engagements associatifs, Anne-Claire vit à Nantes, mais son esprit reste tourné vers Katmandou. « Même si on vit loin, on reste reliés. Par la famille, par les projets, par l’espoir. »