C’est désormais officiel, en pourparlers depuis le début d’année, la droite et le centre mèneront une liste commune pour les élections municipales 2026. Désigné candidat des Républicains après sa victoire lors de la primaire cette été, Foulques Chombart de Lauwe explique le but de cette alliance.
Comment l’alliance a-t-elle été créée ?
C’est le fruit d’une envie commune qui date déjà de la défaite de 2020. On s’est rendu compte que ce n’était probablement pas en restant chacun dans notre ligne de nage qu’on allait réussir à gagner la compétition. Néanmoins, nous avons mené le mandat avec des groupes d’opposition qui étaient séparés, mais qui votaient souvent de la même manière. Donc on a appris à se connaître, notamment avec Sarah El Haïry (MoDem) et Valérie Oppelt (Renaissance) ainsi qu’avec les autres. On s’est découvert des atomes crochus.
Quand avez-vous commencé a réfléchir à une alliance pour les municipales ?
On s’est parlé assez tôt. Dès le début de l’année, nous nous sommes retrouvés. Il fallait trouver le moyen de déterminer qui peut emmener les autres. C’est là que l’idée d’une primaire est sortie. Finalement, cette primaire, j’ai eu du mal à l’obtenir, mais je l’ai gagnée assez largement au sein de ma propre famille. Et le centre a dit qu’il s’allierait avec le vainqueur de cette primaire. Ils ont tenu parole.
La gauche a également formé une coalition, leur annonce a-t-elle accéléré les négociations avec Sarah El Haïry ?
Non, on était déjà extrêmement avancé. Ça fait presque un an qu’on se parle. Au contraire, nous attendions d’entendre ce qu’ils allaient dire pour savoir quand annoncer la nôtre. Ça nous a plutôt fait patienter qu’accélérer.
Pourquoi cette alliance est-elle importante ?
Parce que d’un point de vue mathématique, c’est compliqué de gagner si on est divisé. Les Nantais ont besoin d’un espoir solide et crédible, pas juste besoin d’avoir quelqu’un qui a l’air sympa, mais qui a 10% de chance de gagner. Ils doivent sentir que la personne a vraiment une opportunité de gagner. Cette fois-ci, nous voyons bien que si toutes nos forces sont réunies, nous mettrons toutes les chances de notre côté. C’est aussi de prouver que nous sommes en mesure au niveau local de dépasser des divisions nationales qui désespèrent un peu les gens de la politique. Et être capable de voir que lorsqu’il s’agit de sujets locaux, infrastructures, économies, emplois, logements, nous sommes aptes à trouver un socle commun républicain, droite et centre, intelligent, pas trop dogmatique.
Pourquoi l’union a pris du temps à être officialisé ?
On n’a pas pris tant de temps que ça puisque, si vous regardez bien, on est l’une des premières grandes villes de France à annoncer notre union. D’abord, il y a la primaire qui a retardé les choses. Et ensuite, comme c’était plutôt Julien Bainvel (Les Républicains) qui était donné gagnant, il a fallu aussi que mes partenaires apprennent à me connaître. Ils se disaient “si c’est Foulques, qu’est-ce que ça veut dire d’un point de vue politique, d’un point de vue des idées, des convictions” ? Ils ont pris le temps individuellement de me rencontrer, de se dire :“est-ce qu’on est si loin sur les sujets qui sont importants pour nous” ? Et sur le social et la sécurité, on s’est trouvé des points communs beaucoup plus forts que nos toutes petites divergences. La deuxième chose qui a pris du temps, ce sont les instances officielles de nos partis qui ont des procédures, des commissions nationales d’investiture, il faut que ça remonte, que ça redescende, etc.
Avez-vous dû faire des concessions sur des points de votre programme ?
Pas vraiment, non. On était arrivé avec un socle autour de la sécurité, de l’environnement et du rayonnement de Nantes, de son attractivité retrouvée. Et ça leur a convenu. Les lignes rouges qu’on a posées ensemble sont les mêmes. On ne voulait pas d’augmentation de la fiscalité, pas d’alliance avec le Rassemblement national. Je n’ai pas eu à renoncer à quelque chose d’essentiel pour m’allier avec eux.
N’avez vous pas peur que l’alliance se fragilise en cas de divergence d’opinions sur certains sujets ?
C’est le principe même d’une alliance, c’est qu’il faut être capable de faire quelques concessions pour rester unis. Aujourd’hui, on ne les a pas identifiées, mais il y aura certainement des virages à prendre, et il faudra qu’on soit unis dans ces moments-là. Globalement, je suis assez confiant parce que la puissance d’une alliance tient à l’entente entre les personnes qui la constituent. Et je crois qu’on a la chance de bien s’accorder et surtout, on est capable de se parler.
Depuis 2008, il n’y a pas eu d’alliance entre la droite et le centre, pourquoi cette année ?
En 2014 et 2020, c’étaient des contextes différents. En 2014, la droite se sentait très forte, elle a pensé pouvoir y arriver toute seule. En 2020, le macronisme avait fait irruption depuis 2017. Les écuries politiques ont voulu peser leur poids respectif, et c’est pour ça qu’il n’y a pas eu vraiment d’alliance, même entre le premier et le deuxième tour. Aujourd’hui, je pense qu’une situation nationale plus trouble fait que tout le monde est lucide sur la faiblesse des appareils politiques. En même temps, on touche du doigt un énorme espoir d’un changement. Peut-être parce que nos partis sont moins forts au niveau national, on s’est dit qu’il fallait qu’on arrête de se chamailler, et qu’il fallait qu’on s’unisse.
Pourquoi fermez vous la porte à une alliance avec le Rassemblement national ?
C’est une question de clarté et de conviction, c’est à dire que les gens ont le droit de croire à leurs idées, mais ce ne sont pas les miennes. Je n’aime pas quand le Parti socialiste fait les yeux doux à la France insoumise, et donc je ne vois pas pourquoi je ferais la même chose avec le Rassemblement national. En revanche, je dis toujours aux Nantais qui m’approchent qu’ils sont libres, mais qu’ils sachent que voter RN ou Reconquête aux prochaines élections municipales, c’est voter Johanna Rolland puisqu’ils la favoriseront et ne favoriseront pas l’alternance.
Quel est le problème dans la politique nantaise actuelle ?
Les divisions de la gauche nantaise, notamment entre les écolos et le PS, paralysent la ville. Par exemple, sur les infrastructures, ça nous a empêchés d’avoir un aéroport moderne. Sur la culture, ça nous a empêchés d’avoir l’arbre aux hérons. Sur le logement, leur proposition récente de 40% de logements sociaux, ça va complètement verrouiller la production de logements. Il n’y aura ni logements sociaux, ni logements privés, parce que les opérations ne sortiront pas de terre, le seuil est beaucoup trop élevé. Vous voyez, c’est l’idéologie qui prive les Nantais d’une qualité de vie à laquelle ils étaient attachés. Donc, stop à l’idéologie, et avec du pragmatisme, avec un logiciel de droite, centre, centre-droit, on est capable de changer la vie des gens. Mais à eux de bien choisir en mars.
La ville de Nantes est dirigées par les socialistes depuis 1989, quelle est votre stratégie pour convaincre les électeurs ?
Il faut leur parler vrai, décrire la situation à Nantes telle qu’elle est : une ville avec un immense potentiel, mais sous-exploitée aujourd’hui avec des politiques publiques qui ne fonctionnent pas. Je pense à la sécurité, au déplacement, à la circulation, à la difficulté de trouver une place de crèche. Il faut dire aux gens qu’un maire peut tellement plus pour eux. Ce n’est pas vraiment une question de moyens, c’est une question de volonté politique.
Célian Roselier