A la fin du match contre Saint Etienne, le 30 janvier 2026, les joueurs du FC Nantes avaient réalisé un tour d'honneur en brandissant un maillot d'Emiliano Sala

“Un Argentin qui ne lâche rien” : pourquoi l’affaire Sala touche autant les Nantais

Lundi 8 décembre, le FC Nantes et Cardiff City se sont encore retrouvés au tribunal sur l’affaire Emiliano Sala. Une disparition qui laisse toujours un vide aux Nantais.

Sept ans après le crash qui a coûté la vie à Emiliano Sala, l’affaire revient devant les tribunaux, et avec elle une douleur qui ne quitte jamais vraiment Nantes. La réclamation de 122 millions d’euros déposée par Cardiff City contre le FC Nantes ravive un traumatisme dont les supporters n’ont jamais guéri. 

Un joueur qui mouillait le maillot

Pour Pierre-Yves Leroux, qui a commenté des dizaines de matches du FCN, le lien entre Sala et le public nantais tient d’abord à son état d’esprit.

« Souvent, on dit qu’il faut mouiller le maillot. S’il y a bien quelqu’un qui le faisait, c’était lui », rappelle le journaliste de RMC Sport.

Sala n’était pas une star instantanée, mais un attaquant « à la progression lente, pas toujours simple ». Ce qui a séduit les Nantais, c’est sa façon de ne jamais lâcher. Un buteur besogneux, devenu indispensable à force d’abnégation.

Son transfert en pleine saison aurait pu provoquer la haine de certains supporters comme lors du récent transfert de Valentin Rongier au Stade Rennais, mais dans le cas d’Emiliano Sala, tout le monde était réuni. Le soir de sa disparition, alors qu’il n’était plus au club, des centaines de supporters se rassemblent place Royale à Nantes, pour l’Argentin. 

Une soirée hommage bouleversante

Le 30 janvier, 9 jours après le crash de son avion, alors que son corps n’a toujours pas été retrouvé, un vibrant hommage se déroule à la Beaujoire en amont du match contre l’AS Saint Etienne. 

Les joueurs sont bouleversés, le coach est abattu :

« C’est le match le plus difficile que j’ai préparé et coaché. Ça a été terrible. »

Voici la réaction du coach Vahid Halilhodžić en conférence de presse après le match, un maillot d’Emiliano Sala sur lui. 

Les semaines suivantes, une bannière est disposée devant l’antre nantaise. Depuis ces moments vécus en janvier 2019, les supporters nantais continuent de chanter à chaque match à domicile, à la 9e minute, en l’honneur de leur buteur. 

Au moment de son transfert vers Cardiff, Emiliano Sala était d’ailleurs « dans une phase très positive ». Il a déjà 12 buts inscrits en Ligue 1 à mi-saison… co-meilleur buteur du championnat avec Kylian Mbappé

Une valeur qui a quadruplé

Sa valeur marchande a aussi quadruplé en un peu plus d’un an, passant de 4,5 millions d’euros à 17 millions d’euros en janvier, date de son transfert à Cardiff. Ce départ laissait déjà un vide sportif. Sa disparition, elle, a laissé une cicatrice, rouverte à chaque demande de Cardiff City.

L’évolution de la valeur marchande d’Émiliano Sala © transfermarkt

Les Nantais y voient une forme de brutalité. Le club anglais réclame 122,2 millions d’euros, un montant fondé sur des projections statistiques et financières : manque à gagner commercial, perte de valeur sportive, préjudice d’image, ..

« On est dans du football fiction », juge Pierre-Yves Leroux.

Les avocats gallois s’appuient sur des modèles d’expected goals (XG) pour imaginer les performances qu’Emiliano Sala aurait pu réaliser au club… alors qu’il n’a jamais porté le maillot bleu. « Ce ne sont que des projections, et les XG ne garantissent en rien des buts. »

Le flou autour du vol entretient l’incompréhension des supporters

Ces calculs ont d’ailleurs été très discutés par le tribunal de commerce. Les avocats nantais parlent d’une demande « extravagante » et « aberrante ». Cette somme, pensée comme une indemnisation comptable, est vécue par une partie du public comme une instrumentalisation d’un drame humain.

L’autre point qui perturbe les supporters tient à la complexité du dossier : l’illégalité supposée du vol, l’implication d’agents non autorisés, la responsabilité du mandataire.

« Très sincèrement, c’est très technique », reconnaît le journaliste de RMC. 

Les avocats de Cardiff estiment que le vol n’aurait jamais dû être organisé dans ces conditions. Ceux de Nantes répliquent qu’il n’existe aucun lien de subordination juridique entre le club et le mandataire, et donc aucune responsabilité directe.

Pour beaucoup de Nantais, cette bataille d’experts éloigne le débat de l’essentiel : un joueur aimé est mort dans des circonstances tragiques.

Le verdict sera rendu fin mars 2026.

Le Fil Info

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