Nicolas Meunier est menuisier sur le site de Guédelon.

L’ingénieur du bois dormant

À Guédelon, au cœur de la forêt de Treigny, Nicolas Meunier, ancien ingénieur reconverti dans le travail du bois, redonne vie aux gestes du XIIIᵉ siècle. Aux côtés d’autres artisans, il façonne le mobilier et les structures du château médiéval avec les outils d’époque.

Le bruit du métal sur la pierre se mêle au chant des oiseaux. Dans son l’atelier en plein air, Nicolas Meunier, menuisier au château de Guédelon, affûte ses ciseaux avec soin. « J’avais quelques crans, je suis en train de les réaffûter », murmure-t-il, concentré. Ses gestes, précis et mesurés, semblent suspendre le temps.

Avant de manier la hache et le rabot, Nicolas était ingénieur. Un virage inattendu l’amène vers les métiers d’art. Il obtient un CAP et un BMA en ébénisterie, puis un CAP de menuisier en sièges. Par hasard, il découvre Guédelon, ce chantier unique où des bâtisseurs reconstruisent un château médiéval. « Ça fait deux ans que je suis ici. J’espère que le seigneur est content », plaisante-t-il, les yeux pétillants.

Le goût du geste juste

Ici, tout se fait à la main. Chaque planche est fendue, rabotée et ajustée. « Le plus difficile, c’est l’obtention des planches. Dans les ateliers modernes, elles arrivent déjà découpées. Nous, on fait tout », explique-t-il. Ces jours-ci, il travaille sur une bancelle, petit banc médiéval destiné à l’aménagement du château. « Il faudra dix ans pour finir tout le mobilier, mais ça ne me fait pas peur », ajoute Nicolas Meunier, avec un sourire.

Sous sa casquette d’artisan, il est aussi chercheur. « On fait de l’archéologie expérimentale », dit-il. Chaque geste aide à comprendre comment les artisans façonnaient le bois et comment la main dialoguait avec la matière.

« Quand on est passionné, c’est facile »

Mais parfois, les journées sont rudes, le corps se fatigue. « En début de saison, il faut s’habituer et réfléchir pour se préserver », confie le menuisier, en s’essuyant les mains. Malgré l’effort, la passion guide ses gestes. « Quand on est passionné, c’est facile », sourit-il avant d’ajouter, presque pour lui-même : « Ici, je peux travailler à la main, sans chercher la rentabilité. »

Le soleil descend sur le chantier. Nicolas Meunier recule un instant pour observer son travail. Chaque effort laisse sa trace, comme un fragment de temps gravé dans le bois.

Pauline Le Gall

Le Fil Info

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